Témoignage d'Hélène Rabeyrin

Témoignage de l’accompagnement de mon mari : Jean Rabeyrin, et de moi-même, par le service de soins palliatifs du centre Hospitalier Chambéry Métropole.

Jean est décédé, le 1/07/2022, après avoir séjourné 3 jours dans ce service.


Depuis 2 ans et demi, il souffrait d’un cancer -d’emblée très agressif- qui, malgré un rude combat, s’est aggravé, a flambé le dernier mois, alors que l’on était dans une impasse thérapeutique.


Malgré un traitement très puissant, les douleurs osseuses sont devenues insupportables et le maintien à domicile impossible malgré mon soutien et celui des professionnels. Aussi, à la mi-juin, Jean a été hospitalisé aux urgences, puis en infectiologie, seul service où un lit était disponible un samedi… Dans ce service, Jean -en lien avec l’oncologue- a été suivi par l’équipe antidouleurs qui siège dans le service de soins palliatifs. Cette équipe, n’ayant pas Jean près d’elle pour adapter le traitement, a reconnu être en échec et m’a proposé d’accueillir Jean dans le service de soins palliatifs à compter du mardi 28/06/22, lendemain de notre rencontre. Vu la gravité de la situation, je fais le choix de m’installer, près de Jean, dans sa chambre (présence d’un canapé lit). Ce jour-là, nous sommes accueillis par un infirmier qui s’adresse à Jean et lui pose quelques questions pour faire davantage connaissance. Je précise que mon mari avait perdu la vue et la parole, mais qu’il entendait bien. C’est donc moi qui répondais, mais Jean était vraiment pris en compte comme une personne. L’infirmier demande à Jean s’il a une croyance importante pour lui. Je réponds positivement et avec mon accord, il téléphone à l’aumônière laïque catholique qui arrive 30 minutes après. Nous prenons un 1er temps de prière autour et avec Jean, qui va se renouveler le lendemain, en ma présence et celle d’une nièce. Le 3ème et dernier jour, c’est le prêtre aumônier qui vient donner le dernier sacrement des malades (viatique) à Jean. Je suis là avec 2 amis. Nous vivons, là, un moment de grâce : au moment où le prêtre pose la custode sur le cœur de Jean, son visage d’habitude impassible s’illumine dans un sourire.


L’ensemble du personnel est très attentif, très humain, repère les gestes, les postures à privilégier pour que Jean soit en confort, en tenant compte de mes observations. Dès le soir de son arrivée, grâce à un traitement et accompagnement adapté, Jean ne souffre plus. Il est paisible.

 

La nuit, un binôme « infirmière-aide-soignante » vient toutes les 2 heures et plus, si besoin, dans la chambre. L’infirmière prend le temps de m’écouter et depuis le début de la maladie de mon mari, c’est la 1ère fois que je me sens prise en compte de façon unique.


La situation se dégrade pour Jean. Je préviens les très proches (famille, amis, filleules) qui viennent lui dire A-dieu. Tos soulignent la même qualité d’accueil de la part de tous les membres des équipes (de l’agent de service au médecin chef).


Jean s’éteint le 1/07, tranquillement. Je suis près de lui, avec la présence discrète du binôme de l’équipe de jour.


Nous avons eu la chance de bénéficier du service de soins palliatifs qui fait référence dans notre région « Auvergne Rhône Alpes », composé de 10 lits seulement, pourvu en personnel formé, très engagé humainement, hébergé dans des locaux gais, fonctionnels où il y a de la vie, et où on se sent presque comme à la maison…
Après une période de grandes douleurs, Jean est parti en paix ce qui me met aussi en paix, dans ce chemin difficile de deuil.


En conclusion, je dirai que -dans cette période de fin de vie- la dignité de l’homme, c’est d’être reconnu dans sa fragilité, son besoin de ne pas souffrir et d’être accompagné.
Si ces conditions sont réunies, le patient ne demande ni euthanasie, ni suicide assisté, ce que m’a confirmé le service.
Alors, dans le débat qui s’ouvre, interpellons, vigoureusement, l’État pour qu’il mette, en place, partout, en France, ces services de soins palliatifs, pour un accès égalitaire pour tous.


Hélène Rabeyrin

EDIT : 05/06/2023

 

2 erreurs de transcription :

- "l’aumônière du CH est arrivée 30' après que l'infirmier l'ait appelée" et non pas 3 secondes,
- "quand le prêtre a posé la custode sur le cœur de mon mari, le visage de Jean s'est illuminé dans un sourire" et non pas sans un sourire.

Écrire commentaire

Commentaires: 1
  • #1

    pambet Sylvie (mardi, 06 juin 2023 11:58)

    j'ai connu Jean dans mon parcours professionnel, un homme engagé et doux. Je suis très touchée de ce témoignage de fin de vie, ma prière accompagne la famille